Le vieux couvent situé au 6 bis rue de Valenciennnes, est le plus vieux batiment d'Haspres. On peu toujours y admirer le beau portail en arc brisé, maintenant muré et qui porte des corbeaux en culs de lampe ayant probablement servi à supporter une brétèche pour la défendre.
Une plaque posée en 2001 par l'association "Arts et Loisirs" rappelle ses origines : "VILLE D'HASPRES : Portail d'entrée du couvent des religieuses du conseil Notre Dame fondé en 1230 par GODEFROY de Fontaines, evêque de Cambrai.
Le vieux couvent

En 1230, une abbaye de femmes est fondée à Haspres. Le monastère situé sur la grande route, souvent empruntée par les armées d'invasions, entre CAMBRAI et VALENCIENNES, n'était pas destiné à demeurer longtemps en cet endroit. Trois années seulement après s'être installées les Dames d'Haspres devaient partir.
La fondation de cette abbaye féminine avait été autorisée par Wautier, chamoine de Cambrai et Archiduc de Brabant, en octobre 1230, et fut dotée de revenus "à Denaing, Verchin, Thiant". La première abbesse fut Alice d'AUXY. Le pape Grégoire confirma les biens et les privilèges de ce monastère, qui fut appelé "le conseil Notre Dame". C'est l'évêque de Cambrai qui autorisa les seigneurs d'Haspres, de l'ordre de St Victor de Paris, à transférer leur monastère dans un lieu plus commode. Elles partirent s'établir près de Tournai. L'abbesse d'Haspres, Alice d'AUXY, vecut assez longtemps, puisque le 19 mai 1260, elle prit accord avec l'abbé de Vicoigne, relativement aux revenus de la chapelle d'Haspres.
La cense de maugré

Après le départ des religieuses en 1233, le couvent revient à la prévôté, qui le transforme en ferme fortifiée. Cette ferme fortifiée était composé des batiments enclos de murs dont le bas en grès et qu'un foosé protégeait sans doute devant. Le tracé formait un carré.
Celle-ci sera baillée par la prévôté à des tiers pour en assurer son exploitation. Elle porte alors le nom de cense de Maugré.
Description de la cense en 1619 :
La cense et maison de Maugré et chaintes de murailles de pierre blanche de taille, contenant trois mencaudées et deux boitellets de terre, et faisant le coin et à front de rue de quatre cotés à la grande rue et le chemin allant à Valenciennes à la dite place et jadis le marché aux bestes à la feste dudit Haspres, au chemin allant à Thiant et à la rue de Maugré
Le marché aux bètes :
La place, rue et Warescaix, ou ont vouloit tenir le marché aux bêtes à la feste de la franche ville et prévosté le comte de Haspres, tenant à la cense de Maugré au chemin allant à Thiant aux six muids de Bongré et au chemin allant à Valenciennes, contenant une mencaudée de dix verges de terre suivant les passement des warescaix de l'an 1636, 1639 et 1643, en 1728 Monsieur le prévost de Haspres Dom François de Carondelet en a arrenté une partie dudit marché à Pierre Joseph Cordier et aussi une autre partie a été remis dans les six muids de la cense de Bongré estant que la ditte place et rue derrière la cense de Maugré, n'est plus que vingt cinq pieds de largeur 1749, en 1750 idem.

Les différents baux de la cense :
En 1515, baux des droits d'autelage et des dîmes de la trésorerie, à Jean de Bracques, le jeune. Et en 1532 à Jeanne Catelle, veuve de celui ci.
En 1550, le bail de la cense de Maugré est accordé à Christophe du Tordoir.
En 1572 et 1577 à Paris Tacquet, puis à Jacques Tacquet en 1589. En 1595 à Claude et Pierre Tacquet, fils de Jacques.
En 1604, un premier bail est accordé à Pierre Denis. Le bail est reconduit en 1610, Pierre Denis et Marie de Baillon sa femme déclarent pour la dite ferme : 57 muids 6 mencaudés et 3 boisseau de terres labourables et 21 mencaudées et demi de prairies.
1625 - Procès de Pierre Denis, mayeur de Haspres.
Depuis une vingtaine d'année, Pierre Denis est en jouissance du prest au vivier(1), qu'il entretien à son profit en pratiquant l'advesure de navette (2).
Depuis des temps immémoriaux, les manans et la communauté de Haspres ont pouvoir et faculté, de jouir, colper (couper) et ameubler les Saulchois ou Saulx (saules), etant sur les prêts et warescaix de cette ville. Le campiage, était alors un droit qui consistait à faire paitre les bestiaux sur des terrains vagues ou incultes, qu'on nommait aisements ou wareschaix. Pour en profiter, les manans payent aux religieux de Saint Vaast, chaque année, au premier jour de mai, deux chapons.
Or, maître Pierre Denis, s'est empresser d'en couper une partie, et prétend abattre le reste au grand dam des dits manans, lesquels se retournent vers les autorités (religieux de Saint Vaast) pour faire respecter leur droits.
Une enquête est alors conduite par les religieux de Saint Vaast. Thomas Cattelain, chirurgien, demeurant à Haspres, témoin juré déclare : Que Pierre Denis, fermier, avait l'année passée, ensemencé le prêt du vivier de navette, ayant toujours entendu notamment de son neveu Claude Tacquet, jadis aussi fermier du dit prêt que, celui-ci mesurait 9 mencaudée et que s'il avait été agrandi, c'était en usurpant sur les warescaix que les manants de Haspres ont rompu la clôture du dit prêt et y ont mis leurs bestiaux, que le dit Pierre Denis y aurait mis camper environ 400 blanches bêtes, lesquelles ont plus endommagé la dite navette que n'ont fait les bestiaux des dits manants.
Finalement un arrêt du 3 février 1625 condamne la communauté et donne raison à Pierre Denis.
(1) Le prest au vivier : situé dans l'enclos de la prévôté, c'etait autrefois un étang et vivier, entouré de hautes digues afin de limiter les innondations.
(2) Advesture de navette : action de meubler la terre pour la récolte, de semer et de replanter des graines de navette par exemple.
En 1646, c'est Adrien Bricout qui reprend le bail, ancien fermier de l'abbaye de Saint Aubert de Cambrai dans le village de Bevillers. Son fils Charles lui succède.
En 1716, la bail de la cense est accordée à Marguerite Diselers, veuve de Marc Antoine Carpentier, bailli d'Haspres.
La côte 15H6 nous donne de nombreux renseignements sur le rendage de cette ferme de 1749 à 1770 dont voici un extrait : Jacques Diselers et sa femme, suivant le bail passé en juin 1749 doivent payer annuellement au jour de la Saint André : en blé, mesure de Valenciennes, deux cent mencaudées en nature de la valeur de la prisée de Saint André vendu et livré à leur frais et dépend aux greniers de la prévôté ou à Valenciennes. En argent, 470 florins et pour le pot de vin du présent bail 940 florins payable a concurrence d'un neuvième par année soit 104 florins et 9 patars.
La révolution :
En mai 1795 (27 prairial an III), la ferme de Maugré et son marché de terre sont vendus aux enchères comme biens nationaux.
Que reste t'il aujourd'hui :
Le portail de style ogival en pierres blanches et en grès finement sculpé est situé à l'emplacement d'un quadrilatère formé et limité par les quatre (anciennes) rues : Rue de la Vierge ou de Notre Dame, rue de Valenciennes, rue de Thiant et rue de la fosse aux chevaux. Il existe toujours aujourd'hui et est visible depuis la rue de Valenciennes.
Maugrè vs Bongré
Le Maugré était un droit d'usage en matière de baux ruraux consentit entre le fermier cultivant la terre et son propriétaire. Ce principe défendait au propriétaire de vendre ou louer sa terre à un autre que le premier fermier. Le fermier refusait que le propriétaire lui donne congé et qu'il le remplace par un autre cultivateur. Le fermier était donc maître de fixer le prix du fermage plus encore que le prix de vente. Le droit de marché lui assurait un bail perpétuel au prix qu'il estimait juste et toujours inférieur à celui fixé par le propriétaire.
Ainsi le fermier disposait à son gré de l'ensemble de ces droits qu'il transmettait avec l'exploitation à ses héritiers; il les cédait avec son bail à qui lui plaisait, à condition de payer le chapeau, sans même consulter le propriétaire. Il sous louait une partie des terres plus chers qu'il ne les payait lui même. Le fermier pouvait renoncer à ses droits, mais fallait il que l'achat ou la cession fût réputée de bon gré, qu'aucune intervention judiciaire, aucune menace, aucune pression n'eût contribué à décider le fermier. Dans le cas contraire, même dédommagé, le fermier cédait la terre de Mauvais gré.
Le village de Verchain tirerait son surnom de Maugré de la vigueur avec laquelle il faisait respecter le mauvais grè.