Au sommaire :
» La période révolutionnaire
» L'affaire
» Pour solde de tout compte
» La vente des biens nationaux
» Les derniers religieux
» La fuite à Vicoigne
» La jointe Autrichienne
» La vente de la prévôté
Par un arrêt du 20 décembre 1788, le conseil d'état établit le séquestre des biens et revenus de la prévôté d'Haspres et place les religieux sous l'autorité et l'administration de Louis Marie Joseph Liger, directeur des économats au département d'Artois en lieu et place du prévôt Dom Ambroise RICHE.
Le 18 janvier 1789, Louis Marie Joseph Liger se rend au devant du portail de l'église pour faire lecture et affichage du dit arrêt.
Cet arrêt ordonne la mise sous scellé des titres, papiers, vases sacrés et effets de la dite prévôté, ainsi que la réalisation d'un triple inventaire. Il est également spécifié aux religieux ainsi qu'au Cardinal de Rohan alors abbé commendataire de Saint Vaast de ne pas troubler le Sieur Liger dans sa mission d'économe séquestre de la prévôté. Il va s'en dire que cet arrêt provoque de vives réactions chez les religieux de la prévôté.
Louis XVI appuie son arrêt sur le fait que l'abbaye est de fondation royale transmise par ses ancêtres, qu'elle est bien mal administrée par Dom Ambroise Riche, et qu'elle est devenue un sujet de contestation entre le religieux de Saint Vaast qui y est prévôt et un autre religieux de Saint Vaast commis par l'abbé commendataire. Nous verrons plus tard dans ce chapitre que la défense de Dom Ambroise Riche tente à prouver qu'il n'y a pas de contestation entre lui et Dom Lemaire prévôt de Berclau.
Il semble que cet arrêt ait été sollicité par le cardinal de Rohan, qui vise par ce moyen l'augmentation de ses propres revenus. Car d'ordinaire l'abbé commendataire touche le tiers des revenus de l'abbaye; mais les Celles ou Prévôtés et leurs revenus particuliers, n'entrent pas en ligne de compte.
Louis René Edouard, prince de Rohan est né à Paris en 1734. Il est issu d'une des plus anciennes maisons nobiliaires de France. Au XVII° siècle l'un des membres de la famille avait pris pour devise : "Roi ne puis, Duc ne daigne, Rohan suis" (ce qui pourrait signifier : "Je ne puis me dire Roi, je dédaigne le titre de Duc, mais je suis un prince de Rohan, et ce nom suffit à ma gloire et à mon orgueil !)". En 1771, il est nommé ambassadeur à Vienne, grand aumônier de France en 1777, évêque de Strasbourg en 1779, administrateur de l'hôpital des quinze-vingts, etc.... Autant dire qu'il menait une vie fastueuse et dispendieuse.
En 1780, il sera nommé dernier abbé de Saint Vaast. Il est compromis dans l'affaire du collier de la reine. A la suite de la divulgation de cette intrique, le cardinal est arrêté le 15 août 1785, enfermé à la bastille, il est acquitté en 1786. Elu, malgré lui, député du clergé à l'assemblée constituante, il refuse la constitution civile du clergé. Retiré dans la partie allemande de son évêché, il y lève des troupes qu'il enrôle dans l'armée de Condé. Il meurt à Etteinheim en 1803.
Après avoir accepté ses fonctions d'économe séquestre Louis Marie Joseph LIGER, assisté de Bon Adrien Joseph HAYEZ Huissier royale, se rendent le 14 janvier 1789 à la prévôté pour en exécuter l'inventaire. Après avoir procéder à l'apposition des scellés sur tous les appartements en présence des dix religieux : Dom Ambroise Riche, prévôt; Dom Firmin Vanousthorn, prieur; Dom Odon Bousez; Dom Pierre Roussel; Dom Isidore Le Beau; Dom Dubois; Dom Aimable Delavigne, Dom Hadolphe Dubois; Dom André Dentrebecq et Dom Athernase Bridelance, l'inventaire de la prévôté à commencé.
Le procès verbal dressé contient l'inventaire et le détail des effets, denrées existants dans la prévôté, ainsi que l'énumération des baux, papiers et titres détenus. Les religieux n'ont fait aucune difficulté à la réalisation de cet inventaire.
Dom Hocquet (avocat) dans une lettre du 20 janvier 1789 fera remarquer la dureté et le zèle excessif du Sieur Liger : "L'inventaire fût commencé le 15 du mois de janvier, par le Sieur Liger et le Subdélégué de Bouchain. On doit observer qu'à la vacation du 19 janvier, les éxécuteurs des ordres suspris poussérent la rigeur au delà des termes mêmes de l'arrêt du 20 décembre."
Effectivement à la fin du procès verbal, se trouve consigné : "Ne trouvant plus rien à inventorier ni à écrire, le dit Sieur Liger en sa qualité nous a déclarer requerir expressement que Dom Riche et les autres religieux de la dite prévôté sont tenu d'affirmer en nos mains qu'ils ne recellent directement ni indirectement aucun or et argent, titre, papier et effet appartenant à la dite prévôté et qu'il n'est pas à leur connaissance directe ni indirecte qu'il ait été rien recellé.
Le prévôt et les religieux ont déclaré se refuser d'adhèrer à cette réquisition.
Le Sieur Liger continua d'outre passer ses pouvoirs et de violer les droits de la propriété et de la liberté, en signifiant que les religieux gardaient cachés une partie des objets mentionnés en sa réquisition, et qu'il existait en la prévôté d'autres deniers que les 192 livres trouvées.
Finalement l'arrêt fut signé par Dom Ambroise Riche et ses religieux, avec l'ajout de la mention suivante : "sans néammoins aucune approbation préjudiciable à leurs droits, et sous la réserve et protestation de se pouvoir loi et ainsi qu'il appartiendra".
L'inventaire terminé, le Sieur Liger pris ses fonctions d'économe séquestre de la prévôté et fixa provisoirement la somme annuelle de 20.000 livres pour le vestiaire, la pension alimentaire des religieux, chauffage, blanchissage, lumière et nourriture, gages de serviteurs et domestiques, gages de salaires des médecins, chirurgien et apothicaires.
Le 19 janvier le Sieur Liger se rendit rue de Cambrai à Valenciennes pour effectuer l'inventaire du refuge que la prévôté y possédait.
Devant cette situation, les religieux prirent soin de recourir aux lumières des avocats les plus brillant du parlement de Flandre. C'est ainsi que Dom Bernard Hocquet religieux et agent de l'abbaye de Saint Vaast propose pour la défense des droits de la prévôté de dresser un mémoire, qui servira à dénoncer l'arrêt du 20 décembre 1788. Il prévoit également de le faire imprimer et distribuer aux abbayes voisines également menacées.
Le 22 janvier, l'affaire est présentée au parlement de Douai, qui conclu de présenter au Roi une demande de grâce pour obtenir la révocation de l'arrêt du 20 décembre et d'empêche le Sieur Liger de prendre ses fonctions. L'argumentaire est bâtit sur les faits : que la propriété individuelle est violée, qu'il n'y a aucune contestation concernant la prévôté d'Haspres, le prévôt qui en jouit paisiblement a reçu ses lettres de provisions depuis douze ans, aucun prétendant ne s'est présenté pour l'en déposséder, qu'il n'existe aucune prise de possession contraire et que d'ailleurs aucun tribunal n'est saisi à ce jour de quelconque difficulté. Il est également inutile et superflu de prouver que l'administration des biens et revenus de la dite prévôté est très régulière et au dessus de toute critique; que la notoriété publique en est le garant, et ne permet aucun doute raisonnable sur ce point.
Extrait des registres de la cour de parlement
LA COUR, les chambres assemblées, fait très expressés inhibitions et défenses, par provision et sous le bon plaisir du Roi, audit Liger, Econome Séquestre, nommé par le dit arrêt du conseil d'Etat, et à tous autres, de quelque condition et qualité qu'ils soeient, de donner suite à l'exécution du dit arrêt, en manière quelconque et sous tel pretexte que ce soit, à péril d'être poursuivis extraordinairement suivant la rigueur des ordonnances. Fait pareillement très expressés inhibitions et défenses à tous les receveurs, fermiers, occupeurs et détenteurs des biens de la prévôté d'Haspres, de déférer audit arrêt du conseil ni aux sommations qui pourroient leur avoir été faites en conséquence. Leur fait défenses, suivant ce, de payer leurs fermages en d'autres mains que celles du religieux de la dite prévôté, qui les a reçus jusqu'à présent, à péril de payer deux fois. Ordonne qu'a la diligence dudit procureur général du Roi, le présent arrêt sera signifié aux religieux de la dite prévôté, aux receveurs, fermiers, occupeurs et détenteurs des biens de la dite prévôté, audit Liger et à tous autres qu'il appartiendra, pour qu'ils ne puissent en prétexter cause d'ignorance. Permet les significations requises, être faites à la brétêque et par missive, en forme et manière accoutumées.
Fait à Douay, en Parlement, le 24 janvier 1789.
Devant la conclusion de cet arrêt, le Sieur Liger refuse d'en tenir compte, car ce serait désobéir à celui prononcé par le conseil d'Etat. Il refuse donc de rendre le registre des fermages et l'inde des titres. Devant cette situation, les religieux de la prévôté décide d'adresser une nouvelle requête au Roi, indiquant que la prévôté d'Haspres n'est pas de fondation royale et que si cela avait été le cas, elle aurait un argument supplémentaire à sa faveur.
La côte 15H7 nous propose un état des frais engagés pour la défense de la prévôté, soit :
- A Monsieur Hayet, pour conseils et un travail particulier pour Monsieur le garde des sceaux : 243 livres
- A Monsieur Courtin pour conseils : 72 livres
- A Monsieur Courtin pour conférences et honoraires du premier mémoire imprimé : 1200 livres
- A Monsieur Courtin pour honioraires de la seconde consultation imprimée : 240 livres
- A Messieurs Camus et Delavigne pour conférences au juges du premier mémoire : 144 livres
- A Messieurs Camus et Delavigne pour conférences au sujet de la seconde consultation : 48 livres
- A Monsieur Fenouillet du Closey aux conseils selon son mémoire : 259 livres
- A Monsieur Baudouin imprimeur pour l'impression du premier mémoire contenant 9 feuilles, tiré à deux milles exemplaires : 1323 livres.
- A Monsieur Ballard imprimeur pour l'impression de la requête au roi des habitants d'Haspres, tiré à deux milles exemplaires : 147 livres
- A Monsieur Ballard pour l'impression du second mémoire tiré à deux milles exemplaires : 514 livres
- A Monsieur Du Pont, menuisier pour façon des caisses qui ont servi pour l'envoi des mémoires en provinces : 32 livres
- Pour les voyages à Versailles a effet de voir les ministres et les personnes qui pouvoient nous rendre service : 134 livres
- Pour transport des mémoires aux bureaux des diligences, envoi à Versailles, distribution dans Paris et aux membres de l'assemblée nationale à plusieurs fois : 220 livres
- Pour courses et gratification : 123 livres.
En application de la loi du 14 août 1790, le directoire du district de Valenciennes proclame la clôture des comptes de la prévôté, pour l'administration du temporel pendant la période débutant de la Saint Martin 1789 au 31 décembre 1790.
La balance qui suit, provient des côtes L5108 et 15H7.
La recette est divisée en 5 chapitres : 60.766 l - 7 s - 2 d
Chap 1 - Comporte les fruits en nature provenants de l'exploitation de la ferme de la prévôté, en blé (115 mencaudées), en orge (196 mencaudées), en seigle (11 mencaudées), en avoine (96 mencaudées).
Chap 2 - Canon et droits seigneuriaux, en blé (176 mencaudées), en avoine (88 mencaudées), en argent 1058 l - 3 s - 0 d
Chap 3 - Recette de fermages, montant à 55004 l - 8 s - 2 d
Chap 4 - Vente de bois et graines, montant à 921 l - 0 s - 0 d
Chap 5 - Recette d'arrerages montant à 3752 l - 16 s - 0 d
La dépense est divisée en 13 chapitres : 73.501 l - 18 s - 1 d
Chap 1 - Dépense en nature, blé (599 mencaudées), orge (280 mencaudées), avoine (222 mencaudées)
Chap 2 - Vestiaire et honoraire des religieux : 7620 l - 16 s - 0 d
Chap 3 - Portions congrues et argent : 6703 l - 14 s - 0 d
Chap 4 - Pain, vin, luminaire de l'église : 397 l - 2 s - 8 d
Chap 5 - Rentes, vingtièmes et tailles : 1765 l - 4 s - 11 d
Chap 6 - Cuisine : 10961 l - 9 s - 10 d
Chap 7 - Cave : 2677 l - 3 s - 3 d
Chap 8 - Achats de choses diverse : 12998 l - 18 s - 5 d
Chap 9 - Réparations de l'église, ferme : 5147 l - 10 s - 5 d
Chap 10 - Medecin, chirurgien, barbier : 330 l - 10 s - 0 d
Chap 11 - Gages des Sergeants et domestiques : 1999 l - 4 s - 0 d
Chap 12 - Artisans et Journaliers : 7884 l - 2 s - 4 d
Chap 13 - Frais de procédures et causes diverses : 150016 l - 2 s - 3 d
Ce document montre qu'il manque 12.735 livres dans les caisses de la prévôté pour équilibrer les comptes. Le dossier 15H7, très complet détail pour chaque religieux les frais de vestiaire, honaire et petit vin de messe.
Pour tenter de régler la crise financière à laquelle doit faire face la France, les biens de l'église, puis les biens des émigrés et suspects sont mis en vente. Comme nous le savons, les moines n'exploitent pas leurs terres, mais ils les louent par bail à des censiers, qui en échange retournent une partie des récoltes ou un revenu en argent.
Ainsi la Veuve QUARRE exploite 476 mencaudées, le Sieur Diselers 312 mencaudées, Lestoille 118 mencaudées, la veuve Bruneau 486 mencaudées. Ces gros exploitants craignent la suppression de leur baux. Les affiches de mise en vente des biens de la prévôté, témoignent de la redistribution qui va alors s'opérer. Sur les 1.600 mencaudées vendues, les 2/3 sont rachetés par des Valenciennois. Le reste étant racheté par Jean Joly, maire d'Haspres.
Le 27 juillet 1790 la municipalité d'Haspres se porte acquéreuse des domaines nationaux dont voici la désignation :
Article 1 La prévôté d'Haspres, bâtiments, prés et jardins, de leurs établissements contenants environ vingt sept mencaudées estimées à 21.384 livres de France.
Article 2 La ferme de Jauray appartenant à la dite prévôté, estimée à 1056 livres.
Article 3 La ferme de Fleury et celle de Bongré avec les jardins des ditte ferme appartenant à la ditte prévôté a louées dans l'article cinquième des biens dénommés si dessous estimée à 10.340 livres.
Article 4 Un moulin à eau à moudre le blé, partie de ferme et sept mencaudées de terre labourable appartenante à la ditte prévôté, dont le revenu annuel pour chaque année est estimé à 16.500 livres.
Article 5 Environ mille huit cent quarante et une mencaudées de terre labourable situé sur le territoire dudit Haspres appartenant à la sus ditte prévôté, dont le revenu annuel est estimé à 48.600 livres.
Article 6 Environ cent mencaudées de terre en forêt appartenant à la ditte prévôté estimé à 28.600 livres.
Article 7 Le bénéfice Notre Dame de grotte appartenant à l'abbaye de Saint Vaast d'Arras, contenant vingt huit mencaudées et demie de terre labourable, dont le revenu annuel est estimé à 7.392 livres.
Article 8 Le bénéfice Saint Aycadre appartenant à l'abbaye de Saint Vaast d'Arras, contenant treize mencaudées, dont le revenu annuel est estimé à 2.992 livres.
Article 9 Le bénéfice Saint Etienne appartenant à l'abbaye de Saint Vaast d'Arras, contenant quatorze mencaudées de terre labourable, dont le revenu annuel est estimé à 3.498 livres.
Article 10 Les religieux de Guillemin (*), dix mencaudées et demie de terre labourable, dont le revenu annuel est estimé à 2.772 livres.
Article 11 Les Dames de Beaumont de Valenciennes, vingt deux mencaudées et demie de terre labourable, dont le revenu annuel est estimé à 3.960 livres.
Article 12 La maison de cure y compris le jardin occupé par lui même, dont le revenu annuel est estimé à 1.320 livres.
Article 13 Dix mencaudées de terre labourable appartenant à la ditte cure, dont le revenu annuel est estimé à 2.200 livres
Article 14 La chapelle de Notre Dame de Foy, appartenant à l'abbaye de Saint Vaast d'Arras, contenant sept mencaudées environ de terre labourable, dont les revenus annuels sont estimé à 1.540 livres.
Article 15 Le Jésuite de Valenciennes, vingt deux mencaudées et demie de terre labourable, dont le revenu annuel est estimé à 3.260 livres.
Suivent les signatures de : Jean Joly Maire, Remy Lenglet, Jean Philippe Decornet, Adrien Mercier, Jacques Moreau, Jean Basptiste Massart, Alexis Duquesne, Charles Verin, Augustin Lamotte, Antoine Debève, Eloy Delsautière, F Taisne, Nicolas Mereau.
(*) Non loin de Cambrai, au milieu des bois, se trouve Walincourt, bourg assez important, remarquable par l'aménité de son site. On y voyait, outre le prieuré des Guillemin dont il sera question plus bas, l'église collégiale de Notre Dame, etc.... (src : Cameracum Christianum)
Voici un état estimatif des domaines nationaux aliénés à la municipalité de Valenciennes et compris dans la soumission par la municipalité d'Haspres que nous pouvons fournir en date du 24 avril 1792.
1. Vingt trois mencaudées, trente neuf verges de terre labourable occupées par Jacques Bricout pour 7771 livres 17 sols.
2. Quatre cent soixante seize mencaudées, soixante douze verges de terre labourables occupées par la veuve Quarré pour 94.862 livres 19 deniers 10 sols.
3. Trois cent douze mencaudées, quatre pintes de terre labourable avec une maison de cense occupée par Jean Jacques Diselers pour 61.515 livres 15 deniers 2 sols.
4. Un moulin à eau avec toute son armure situé audit Haspres et occupé par Pierre Joseph Lagrue pour 12.794 livres 4 deniers.
5. Une maison de cense et quatre cent quatre vingt six mencaudées de terre labourable occupées par la Veuve Bruneau à Haspres pour 113.234 livres.
6. Deux cent vingt cinq mencaudées de terre occupées par différents particuliers situés à Haspres pour 63.900 livres.
7. Le marché illisible contenant cent dix huit mencaudées, deux pintes occupées par Letoile pour 23.476 livres 4 deniers.
8. Deux cent vingt cinq mencaudées en une seule pièce occupées par Raoût, D'Haussy pour 39.600 livres.
Nous trouvons dans la série L9412, un document daté du 12 mars 1791, ou figure le nom des derniers religieux de la prévôté d'Haspres.
Amboise RICHE, prévôt. Nous le retrouvons en 1793 à Gage dans le Hainaut Belge. En décembre 1793 il quitte Gage pour Orbais.
Obon BOUSEZ, au baptême : Jean Pierre Joseph, né le 1° mai 1732; il fait profession le 21 mars 1753. En 1780 il était à Haspres. Nous l'y retrouvons en 1791.
Pierre ROUSSEL, au baptême : Pierre Joseph, né le 20 mai 1737, il fait profession le 21 février 1760. En 1780 il était à Haspres. Nous l'y retrouvons en 1791. Réfugié à Mons.
Isidore LEBEAU, au baptême : Jean François Isidore, né le 1° février 1740 à Avesnes sur helpes de Thomas Le beau et Marie Jeanne Hainault. Il fait profession le 12 avril 1761. En 1780 il était à Haspres. Nous l'y retrouvons en 1791. On trouve ensuite trace de sa présence à Bruxelles le 30 octobre 1792 : "Certifions que M. Isidore Lebeau, religieux prêtre de l'abbaye de Saint Vaast, diocèse d'Arras, âgé de cinquante deux ans, lequel a signé avec nous, est digne de l"azile" que leurs Altesses Royales ont la bonté d'accorder aux Français fidèles à Dieu et à leur Roi." Il décède en l'an VIII de la république.
Charles DUBOIS, au baptême : Charles Joseph. Né le 23 avril 1750, il fait profession le 21 mars 1772. En 1791 nous le trouvons à la prévôté d'Haspres. Le 14 avril 1792, un document atteste que A.Dentrebecq a célébré la messe dans la chapelle de Bouveneuil à Verchain (SRC L 5108).
Amable DE LA VIGNE, né en 1755, le 26 juillet, vêtu en 1775, il fit profession le 1° octobre 1776. Son nom de baptême était Jean Louis. En 1791 il habitait la prévôté d'Haspres.
André DENTREBECQ, au baptême François Alexis. Né le 30 août 1754, il fait profession le 6 février 1777. En 1791 nous le trouvons habitant la prévôté d'Haspres.
Hadulphe DUBOIS, au baptême : Nicolas Joseph. Né le 26 janvier 1756, il fait profession le 6 février 1777. En 1791 nous le trouvons habitant la prévôté d'Haspres.
Athanas BRIDELAINE ou BRIDELANCE, au baptême Philippe Joseph. Né le 16 octobre 1754, vêtu en 1778, il fait profession le 6 février 1780. En 1791 nous le trouvons à Haspres, puis dans le diocèse de Malines, où il est nanti d'un "celebret" (autorisation permettant à un prêtre de célébrer la messe dans une commune qui n'est pas la sienne) daté du 12 novembre 1792. Réfugié à Mons.
Louis François VAN OUSTHORN, prieur d'Haspres, fut enfermé à la prison du Quesnoy pour ne pas avoir prêté le serment civique qu'il déclare avoir "prêté". Après avoir passé quelques temps enfermé, il est libéré et prête serment à Valenciennes. Nous avons retrouvé sur une attestation de résidence de 1793 une description physique de Louis François Vanhousthorn "ci devant prieur, 67 ans, taille 5 pieds 3 pouces, cheveux et sourcils gris, yeux bleus, menton rond, front découvert, bouche moyenne, nez gros, visage oval, à prêté le serment requis par la loi du 14 août 1792. Demeure depuis environ dix mois rue Croix du neuf bourg, paroisse Notre Dame La Grande."
Fin 1794, on retrouve l'ex prieur en compagnie de François Nonier une nouvelle fois emprisonné au Quesnoy. "Louis François Vanhousthorn, religieux de Saint Vaast, et François Nonier, prévenus d'avoir voulu passer à l'étranger avec plusieurs effets, détenus depuis le 19 Octobre jusque y compris le 19 Décembre suivant, faisant ensemble 124 jours." Il décède le 9 janvier 1794 à l'hôtel Dieu de Valenciennes.
Ne figurent pas sur la liste de la série L9412 :
Jean SOHIER, né le 9 novembre 1743, Son nom de baptême était Jean Joseph. Il fit profession le 21 mars 1767. En 1780 il était à Haspres. En 1791 il était encore dans la communauté.
Philibert GOUILLARD ou GOUILLIART, au baptême : Joseph Augustin Marie. Né le 15 février 1748, il fait profession le 21 mars 1773. Il était à Haspres. Nous le trouvons au Maisnil en 1791.
Norbert GRENDAL, né le 13 mai 1752. Son nom de baptême était Henri Joseph. Il fit profession le 21 mars 1775. En 1780 il était à Haspres. En 1791 il était encore dans la communauté. Il est décédé à Saint Omer, le 10 avril 1828, agé de 72 ans.
Finalement un décret du 23 mai 1791 décide du sort de la prévôté. L'abbaye de Vicoigne est désignée comme maison de retraite de 98 bénédictins de Bergues, Hasnon, St Sépulcre de Cambrai, collège St Vaast de Douai, Haspres et de la prévôté ND de Valenciennes. Les bénédictins réfugiés sont placés sous l'autorité de Dom Benoit Lempereur (lui même réfugié de Maroilles). François Rousseau (auteur de Moines Bénédictins martyrs et confesseur de la foi pendant la révolution) souligne la haine des ennemis des ordres religieux : on transplante des fils de Saint Benoit dans des couvents d'Augustins ou de Prémontrés, alors que ceux ci doivent aller occuper des monastères appartenant aux Bénédictins; ou bien on réalise les réunions les plus hétéroclites pour décourager les meilleures volontés.
Hélas la trève allait être de courte durée, et le refuge bien précaire, après l'arrêt du I° septembre 1792 qui ordonna l'expulsion des religieux dans un délais de 24 heures. Les moines furent jetés à la rue, sans pouvoir même emmener avec eux leurs livres de chants.
Le 10 juin 1792, la prévôté est mise en vente au district de Valenciennes : "Maison ci devant Prévôté d'Haspres, y compris tous les jardins, cours, basse cour et autres - bois planté de haute futais et de "raspes". Excepté la maison commune, le ci devant fruitier vis à vis de l'église, l'église et le clocher, réservés pour la communauté - Mise à prix 39880 l 10 s". Maurice CACHEUX en est le premier acquéreur pour 112 500 l. Elle revient ensuite à Jean JOLY le 23 janvier 1793. Celui ci n'arrivant pas à régler sa dette, la prévôté est cédée le 7 février 1793 au Sieur RICHARD. Il réclama dans son adjudication : le clocher, la maison de la ci devant maîtresse d'école et les bois blancs plantée au delà des fossés. La demande fut dans un premier temps rejetté, puis un arrêté reconnu que la propriété de clocher et de l'église comme faisant partie des bâtiments de la prévôté. Ce dernier décède et ses héritiers la revendront à Jean Louis BOURLET.
Les calepins journalier du directoire de Valenciennes, nous apporte quelques renseignements complémentaires sur les malheurs de la prévôté :
"Dénonciation de Maurice CACHEUX, gardien de la maison et église de la ci devant prévôté d'Haspres, de violation de scellés par le Sieur JOLY, fils du maire."
Le même CACHEUX se plaint des "effractions faites aux meubles établis à sa garde."
Haspres est occupé par les troupes Autrichienne du 10 août 1793 au 27 avril 1794. Pour permettre la gestion des territoires nouvellement envahis, l'ennemi installe à Valenciennes une administration militaire appelée la "jointe". Dès son installation la jointe décrète l'abolition de toutes les magistratures révolutionnaires, le rétablissement des anciennes juridictions ainsi que la levée du sequestres des biens des émigrés français.
Nombre d'émigrés, nobles, bourgeois, curés, religieux regagnent leurs terres. Les abbayes demandent à la jointe leur réintégration. La situation désespérée de nos religieux dépend à cet instant de la jointe. En effet pour rentrer chez eux, les émigrés doivent prêter serment et fidélité à l'empereur et s'engager à ne pas réclamer leurs biens aliénés par la révolution.
Néanmoins les religieux veulent réintégrer leur prévôté, comme en témoinge le registre de la jointe du 6 août 1793, côte L9049 - n° 192 : "Sur requête des religieux de la prévôté d'Haspres, tendante à être réintégrés dans leurs droits et propriétés et à pouvoir habiter en attendant leur maison. Il a été résolu de coucher l'apostille qui suit. Rapport fait, la jointe autorise les suppléants à habiter provisoirement leur maison, et quant à leur réintégration, ils devront se pourvoir par requête séparée."
La côte n°230 de ce même registre précise : "Sur requête des religieux de la prévôté d'Haspres, demandant d'être autorisés à rentrer dans la possession de tous leurs biens et nommément à recueillir leurs dimes. Il a été résolu d'accorder aux suppléans l'acte suivant en attendant que le gouvernement général ait prononcé sur la réintégration de cette maison religieuse. La jointe déclare par le présent acte qu'elle accorde provisionnellement aux prévôt et religieux de la prévôté d'Haspres la permission de recueillir les dimes appartenantes à la dite prévôté à charge de rendre compte à la jointe du produit de ces dimes lorsqu'ils en seront requis."
Le 5 septembre 1793, Dom Isidore Lebeau, représente le prévôt d'Haspres à la jointe pour tenter un ultime recours.
L'affaire de la réintégration traine en longueur, et les religieux se manifestent une nouvelle fois auprès de la jointe, qui leur rétorque : "La cause en est que l'abbaye de St Vaast, à Arras, leur maison mère, est encore en la puissance de l'ennemi."