La guerre de cent ans et la rivalité entre le roi de France et le duc de Bourgogne, forment l'un des épisodes les plus tragiques de l'histoire du Hainaut et du Cambrésis. Les grands vassaux alliés aux Anglais contre le roi de France vont se livrer aux pires cruautés de la guerre.
En 1308, Philippe le Bel (le roi de fer) règne sur la France. Une bulle du Pape Clément V, confirme Thieri de Suisy, moine de l'abbaye de Saint Jean à Laon à la tête de la prévôté d'Haspres en remplacement du frère Nicolas.
Selon les annales de Cambrai, c'est en 1309 que l'on aurait commencé à y tisser la batiste, dite aussi toile de Cambrai. C'est également en ce XIV° siècle que la ville d'Haspres va acquérir un certain renom pour la qualité de ses toiles. Les riches chamoinesses de Maubeuge recoururent à un habitant d'Haspres en 1390, à l'occasion d'une de leurs procéssions de Sainte Aldegonde. "Il a été payé à Jehan de Haspres, pour V paires de Wans et pour Kapiaux la somme de VII sous".(Charles Laurent)
L'hiver 1314 fut particulièrement rigoureux installant famine et disette pour les années suivantes.
Au début de la guerre, en septembre 1339, la Flandre conclu avec l'Angleterre une alliance que le roi de France Philippe VI de Valois voit d'un mauvais oeil.
Le roi Edouard III d'Angleterre à la tête d'une armée de vingt mille hommes, arrive dans le Hainaut, passe par Valenciennes, puis se rend à Cambrai pour en entreprendre le siège. Il se dirige à Haspres accompagné du comte de Hainaut, pour s'y établir deux jours durant en attentand le gros des troupes alliées.
Durant son séjour à Haspres, ses troupes ne cessent de traverser le village pour se rendre à Avesnes le Sec, Naves, Cagnocles en vue des préparatifs du siège de Cambrai. A la fin de son séjour Edouard d'Angleterre quitte Haspres pour se diriger vers Iwuy, ou il établit son quartier général. Durant l'occupation d'Iwuy les Anglais firent subir aux habitants les pires vexations. Quelques jours après se sont 500 lances du Comte Guillaume et Jean de Hainaut qui passent à Haspres, suivit de peu par les troupes du Duc de Brabant. Comme l'a écrit Salembier C'est sous les murs de Cambrai, assiégé en vain par Edouard III, que se joua le premier acte de la guerre de cent ans". C'est à cette occasion que les premières "pièces d'artillerie" auraient été utilisées.
Le chroniqueur Valenciennois Oultreman précise : "L'année 1340, la garnison Française qui était dans Cambrai vint brûler la ville et le monastère d'Haspres. Ces nouvelles vinrent devant le Comte Guillaume, qui, se levant soudain, courut au marché de Valenciennes qui se tenait dans cette ville, fit sonner la cloche du beffroi pour faire alarme et aller au secours d'Haspres, avec ce qu'il put amasser de soldats et de bourgeois; ils poursuivirent les Français qui se sauvèrent en prenant la fuite avec leur riche butin et les bourgeois du dit Haspres dans Cambrai."
Ce douloureux épisode fut affreux pour la population du Hainaut et du Cambrésis. Partout des crimes sont commis, les villages pillés puis incendiés à tour de rôle par les troupes de chaque partie. Les récoltes et le bétail sont détruits ou confisqués. Une partie du village de Saulzoir est brûlée par les troupes du Comte de Hainaut.
En 1340, le comte de Hainaut, quoique neveu du roi de France Philippe, s'était ligué avec l'Angleterre, ce qui autorisait nos armées à courir par ses villes et campagnes, et tout brûler et ravager. Haspres, qui était alors une ville forte avec remparts et fossés, fut cependant aisément prise, car mal avertie de nos desseins, elle avait laissé ses portes ouvertes, et à peine nos soldats y furent ils entrés, qu'on vit les flammes et la fumée s'élever par torrens jusqu'aux cieux. Il ne resta des maisons que les murs. Un couvent de bénédictins qui était là fut transporté à Cambrai et à Douai, qui tenaient pour le parti de nos rois.
Le comte de Hainaut, qui résidait à Valenciennes, apprenant cette échauffourée, monte à cheval avec ses gardes, et accourt, mais trop tard, pour défendre ses sujets. S'il ne peut les défendre, il veut du moins les venger. Il appelle autour de lui les plus braves de ses chevaliers, et, s'élançant contre le petit nombre de Français restés à Haspres, il y rentre en vainqueur, et va à son tour mettre le Cambrésis à feu et à sang.
Aux troupes du Hainaut se joignent celles du Brabant, et il fallut que le roi de France, pour empêcher une invasion, opposa à cette nombreuse armée une armée semblable, dont il donna le commandement à son fils aîné, duc de Normandie. Mais comme si ce n'eut pas été assez de nos soldats pour combattre les princes du Nord, le roi invoqua le puissant pape, qui, en effet, le seconda de ses foudres apostoliques.
Les Flamands se montrèrent singulièrement affligés d'une telle privation, et ils s'en plaignaient et lamentaient, quand le roi d'Angleterre leur fit dire qu'ils ne s'en missent pas trops en peine, et que si le pape ne revenait pas sur son bref, il leur enverrait d'outre mer des prêtes moins timorés qui leur chanteraient messe et vêpres. On voit là le commencement des dissentions entre Londres et Rome; la résolution qu'Edouard était disposé à prendre fut le germe des grands changements qui s'accomplirent sous Henri VIII. Quant aux habitants du Hainaut, les rigueurs ecclésiastiques ne les émurent que modérément. Ils n'étaient dévots que dans de certaines limites, et avec un juste calcul. Leur esprit se manisfesta davantage en 1378, à l'époque où les deux papes Urbain et Clément se virent élus à la fois. Le Brabant était pour le premier, la France pour le second; mais le Hainaut seul resta neutre (le clergé aussi bien que le peuple) suspendant, par provision, et jusqu'à ce que le débat fût vidé entre leurs saintetés, le paiement des droits temporels qu'ils devaient à l'église romaine.
Description du département du Nord - Grille François editions SAZERAC et DUVAL 1825Ce récit et celui qui suit, confirment la présence des remparts à Haspres à cette époque. Il est toutefois plus juste de parler d'élévation de terrain que de véritables remparts. D'ailleurs Duvivier dans son article sur les fortifications d'Haspres rédigé en 1954, précise à propos de ce fossé qu'il s'agit de la Selle et de sa dérivation; mais il semble bien que des fossés avaient été creusés pour entourer les agrandissements d'Haspres sur les pentes de la vallée. Fossés sec, constituant un obstacle de peu de valeur pour des agresseurs audacieux et résolus. Haspres devait également être entouré de robustes murailles renforcées éventuellement de quelques tours avec fossé devant, d'où cette expression : fossoyé.
Quant au tracé, on l'imagine aisément sur la rive droite, marqué par les rues du marais, de la vierge et de Saulzoir. Sur la rive gauche, où la ville était moins développée, le tracé reste imprécis, peut être même s'était on contenté de la Selle comme seul obstacle, à moins que la construction des remparts Espagnols ait tout fait disparaître.
Quand les troupes du roi Edouard et de ses alliés se furent retirées, la garnison française de Cambrai, qui, depuis longtemps, etait enfermée dans ses murs, ayant été autorisée par le roi de France, "mit sus une chevauchée de 600 hommes d'armes d'armes en se portant un samedy au poinct du jour; ceux de la Malmaison arrivèrent en même temps que ceux de Cambray en la ville d'Haspres, qui était une moult bonne ville et grosse, mais n'était pas fermée, mais seulement fossoyée. Les gens du dedans étaient sans aucune crainte. Les Français entrèrent dedans et trouvèrent les gens, hommes et femmes, en leurs hôtels; ils prirent à leur volonté, et tout ce qu'ils possédaient : or, argent, draps, joyaux et bestes, et puis boutèrent le feu en la ville et l'ardèrent si nettement que rien n'y demeura, fors les parois".
Récit de FroissartEn 1346 à lieu la bataille de Crecy, où les français sont vaincus par les Anglais.
En 1349 le choléra ravage la région du Hainaut, de nombreuses familles sont touchées par ce fléau.
La lutte continue entre la France et l'Angleterre, le roi Edouard III d'Angleterre prend Calais en 1347 après un siège qui dura onze mois. Une trêve est signée au mois de septembre 1347.
La guerre reprend quelques mois plus tard, l'Artois est ravagé. Le roi Jean le Bon sucesseur de Philippe VI, brave mais imprudent, est vaincu et fait prisonnier à Poitiers en 1356 par le Prince Noir, fils d'Edouard III. En 1360 le traité de Brétigny libère Jean le Bon. C'est à partir de 1361, que l'on voit des bandes armées circuler autour de Valenciennes, incendiant et pillant çà et là. Vers 1365 Messire Grars de Vendegies et Messire de Floïon, se trouvant à Haspres mirent en fuite le comte de Liches.
En décembre 1377, Charles IV, Empereur d'Allemagne, passa à Haspres avec son fils, se rendant à Cambrai. Le magistrat de Valenciennes, ne voulut pas s'y rendre pour le complimenter; il se borna à lui faire parvenir des excuses par le bailli d'Haspres, argumentant que le temps lui avait manqué pour réunir le grand conseil.
En 1392, par une très chaude journée d'été, le jeune roi de France Charles VI, traversant la forêt du Mans, est brusquement arrêté par un inconnu en haillon. A la suite de cette rencontre, il devient fou. Une statue de cire du monarque est alors envoyée à Haspres pour honorer Saint Achaire, guerisseur des acariatres. Les chroniques de l'époque disent qu'à l'issue, le roi trouva un grand soulagement à cette "frénésie" dont il était atteint. Il ne mourut en tout cas, qu'une trentaine d'année plus tard en 1421.
Sources utilisées :
- André JURENIL - Denain et l'ostrevant
- Charles Laurent - Histoire de la Franche Ville d'Haspres
- François Joseph Grille - Description du département du Nord (1825)
- François Joseph de Saint Genois - Les monuments anciens du Hainaut
- Histoire d'Iwuy par les abbés Dehaisnes et Bontemps