Nos aieux ne possédaient ni cinéma, ni télévision, ni internet, et pourtant ils s'avaient s'amuser.
Bien qu'il soit difficile de retrouver trace de ces anciennes sociétés, les archives départementale du Nord ont conservées certaines déclarations de sociétés qui nous permettent d'avoir une vision des jeux, sports et divertissements populaires au début du siècle dernier.
Au sommaire :
» Les coulonneux
» Tir et gymnastique
» Musiques et chants
» Les combats de coq
» Les javeloteux
» Les jeux qui se pratiquaient à Haspres
Coulonneux (colombophile), une passion ancestrale de la région du Nord :
Qui n'a jamais remarqué les nombreux pigeonniers que conserve notre village. Certains mériteraient même d'être classé au patrimoine local vu leur élégance architecturale.
La colombophilie est un art très ancien qui consiste à élever et dresser des pigeons voyageurs. Réservée aux chatelains et aux moines jusqu'en 1789, la colombophilie devient une véritable passion dans les milieux ouvriers au XIX° siècle.
En 1870, la colombophilie devient d'une grande utilité à l'armée française. Des pigeons voyageurs sont utilisés pour assurer les communications entre Paris assiégé et la province. En 1914, on voit même des pigeonniers civils réquisitionnés par l'armée.
Ainsi après la guerre, la colombophilie se voit réglementée par l'autorité militaire. Dès lors pour exercer cette activité il faut montrer patte blanche. Enfin la posséssion de pigeons voyageurs se limitera uniquement aux associations à but non lucratif.
La 6 aout 1899, une demande au sujet de la création d'une société colombophile est déposée à la prefecture. Cette société comme le défini l'article premier de son réglement, a pour but de favoriser le voyage des pigeons afin de venir en aide au pays en cas de guerre.
Son siége est situé route de Cambrai à Haspres, chez Madame Veuve CATTIAUX - DELFOSSE. Voici quelques extraits de son réglement.
La société sera composée au maximum de 50 membres actifs. La cotisation mensuelle est fixée à 0,50 francs. Tout sociétaire qui aura tué un "emouchet" ou tout autre oiseau nuisible aux pigeons recevra une gratification de 2 francs, de même lorsqu'un sociétaire pourra prouver qu'un chasseur aura tué ou même tiré sur un pigeon voyageur, il recevra une gratification de 10 francs.
La société est administrée par une commission de trois membres. Les assemblées auront lieu les dimanches qui suivront les 5 et 20 de chaque mois. Toutes questions politiques et religieuses sont interdites pendant les réunions.
Liste des membres actifs au 9 aout 1899
Hector COSSART - Président
Charles DEROME - Vice Président
Joseph CATTIAUX - Trésorier
Emile BANSE - Membre
Aimable COLIN - Membre
Charles MORELLE - Membre
Jules FONTAINE - Membre
Les concours se partagent en trois formes. Au concours de vitesse, les pigeons sont lachés à des distances se situant entre 50 et 250 km. Pour le concours de demi fond, les lâchers s'effectuent à une distance comprise entre 250 et 550 km. Enfin, pour le concours de fond, les distances dépassent 550 km pour atteindre les 800 km.
Un réglement officiel encadre chaque concours. Les participants doivent être titulaires d'une licence colombophile et rédiger une feuille d'enlogement des oiseaux qu'ils engagent. Chaque pigeons est porteur de deux bagues, l'une portant le numéro matricule, exigé à l'origine par les instances militaires, l'autre portant l'adresse du colombophile propriétaire.
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Au Local Unique Colombophile - 1949 | ||
Voici les résultats du concours sur Creil du 24 avril. Vitesse du premier : 1027 m 20. Les quinze premiers : Deliège, Trioux, Voisin, J.Morelle, Plichon, Verquin, Marcaille, Verquin, P.Morelle, E.Dagniaux, Verquin, A.Coquelet, Trioux, Voisin, A.Coquelet. | ||
L'objet est remporté par Eugène Trioux d'Avesnes le Sec. | ||
Dimanche 8 mai, concours sur Brétigny. Mise en loges, vendredi 6 mai, de 16 à 17h45. | ||
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Les pigeons sont mis en loges, au siège de l'association organisatrice sous la surveillance des organisateurs. Cette mise en panier, en prévision du transport, se fait au moyen de boites du type "sécuritas", permettant d'enloger 24 à 36 pigeons au mètre carré. Chaque coulonneux aura pris soin de noter scrupuleusement les numéros des bagues matricules de ses pigeons. Pour le constat d'arrivée, les pigeons sont muni d'une bague en caoutchouc qui fait l'objet d'une attention particulièrement stricte. Les paniers sont ensuite acheminés sur les lieux de lâchers sous la surveillance des convoyeurs.
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Au Local Unique Colombophile - 1949 | ||
Résultats du concours sur Brétigny du dimanche 8 mai : lâcher 6h52, premier pigeon à 10h02, vitesse : 1081m 20. | ||
Les dix premiers : Trioux, Trioux, Pamart, Journet, Voisin, Marquaille, J.Morelle, Plichon, Voisin, J.Morelle. | ||
Dimanche 15 mai, concours sur Creil. Mise en loges samedi 14, de 16h à 17h45. Un jambon sera joué à l'objet. | ||
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Au lieu du lâcher, les piegeons sont libérés au petit matin. Les pigeons font quelques tours dans le ciel pour s'orienter avant de s'envoler en direction de leur colombier. La durée de l'attente est fonction du genre de concours. Chaque coulonneux sait qu'à partir de telle heure ils peuvent être là. Scrutant le ciel, il reconnaîtra les siens. Sans perdre une seconde, il enlève la bague de concours et la met dans l'orifice du constateur dans l'ordre d'arrivée.
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Au Local Unique Colombophile - 1949 | ||
Résultats du concours sur Creil du 19 juin, les 10 premiers : Selliez, Deloffre, Voisin, Plichon, Deliège, Marcaille, Pamart. | ||
L'objet est remporté par Selliez. Les series par Monsieur Voisin d'Avesnes le Sec; E.Plichon et J.Morelle d'Haspres. | ||
Résultats du concours sur Angerville du 26 juin, les dix premiers : Deliège, Deloffre, Dagniaux, Pamart, Pamart, J.Morelle, P.Morelle, Rigaux, H.Dhaussy, Trioux. | ||
L'objet est remporté par Marcel Deloffre. Les séries par L.Pamart et J.Morelle d'Haspres et Paul Morelle d'Avesnes le Sec. Dimanche 3 juillet, concours sur Chantilly (vieux et jeunes). Mise en loges samedi de 16 à 17h30. | ||
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Le constateur, appareil précis d'horlogerie, est utilisé pour calculer la vitesse réalisée par chacun des pigeons.
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Les sociétés de tirs au fusil et de gymnastique, connaissent un succès populaire après la défaite de 1870. En effet un esprit de revanche qui anime cette époque, une seule idée fixe : récupérer l'Alsace et la Lorraine. Partout en France les initiatives se multiplient. Un enseignement patriotique et militaire est assigné à l'école de la République. Un seul objectif former un citoyen qui connait ses devoirs civiques et militaires. Au travers de celui-ci, on se prépare clairement à la guerre. Le manque d'instruction des conscrits est l'une des principales causes de la défaite de 1870. L'enseignement de l'écriture et de la lecture devient une priorité du programme scolaire, car la compréhension des ordres ou des consignes est cruciale sur le champ de bataille. Parallèllement on introduit des disciplines comme le tir et la gymnastique dans les programmes d'éducation physique qui sont un bon moyen de former les futurs soldats.
Le 5 avril 1900, Monsieur Devillers instituteur à Haspres transmet à la prefecture de Lille une demande de création à l'école des garçons (celle ci se trouvait à l'emplacement de l'actuel monument aux morts), d'une société de tir et de gymnastique pour les jeunes de 13 à 20 ans. La demande est accepté le mois suivant. En voici les principales caractéristiques :
La société prend le nom de "Société de tir et de gymnastique des anciens élèves de l'école d'Haspres". L'association de jeunes gens a pour but de se livrer à des exercices de tir et de gymnastique.
La société se compose de membres honoraires et de membres actifs. Les membres actifs sont d'anciens élèves de 13 à 20 ans. Elle est administrée par un comité de quatre membres : l'instituteur président de droit, l'instructeur directeur de tir, un secrétaire et un trésorier élus tous les deux par les associés pour l'année courante et pris parmi les membres actifs. Monsieur le maire d'Haspres est le président d'honneur de la dite société.
Il est demandé en guise de cotisation le premier mois à chaque sociétaire le versement d'un franc comme droit d'entrée, puis 0.25 cts les autres mois payables à la première réunion de chaque mois. Les cotisations des membres honoraires sont fixées au minimum de deux francs.
Après la formation de la société, tout nouveau sociétaire ne pourra être admis qu'après avoir été accepté par l'assemblée générale et en payant un droit d'entrée de deux francs. Exception est faite pour les jeunes gens quittant l'école qui demande aussitôt à faire partie de la société. En août et septembre, les réunions n'ayant pas lieu, il ne sera pas perçu de cotisation.
Tout sociétaire en retard de deux cotisations mensuelles ou dont la conduite en réunion aura été indiqne et contraire au bon ordre sera exclu en assamblée générale sans avoir droit à avoir remboursement.
Les réunions auront lieu tous les dimanches de 14h00 à 15h30. Les exercices de tir et de gymnastique seront alternatifs. Toutefois les exercices de tir ne commenceront que lorsque la théorie aura été enseignée. Chaque sociétaire pourra alors tirer un carton de quatre balles pour cinq centimes.
En hiver par mauvais temps, les exercices au dehors seront remplacés par de l'instructions, conférences, chants, fête scolaire, etc.... Le dernier dimanche de chaque mois aura lieu une réunion générale; la présence de chaque sociétaire étant obligatoire, toute absence non motivée entrainera une amende de vingt cinq centimes.
Deux fois par an, le lundi de Pâques et le 14 juillet sera organisé un tir gratuit dont les prix décidés en assemblée générale, seront payés par la caisse de la société.
Toute discussion politique ou religieuse est rigoureusement interdite. Les tireurs sont tenus pour responsable des accidents et des dégats qu'ils pourraient occasionner.
Le document est paraphé par : L'instituteur et président Monsieur Deviller, le Secrétaire Monsieur Chevalier, l'instructeur Monsieur Barbetly et le trésorier Monsieur Marouzé.
Liste des membres actifs au 5 avril 1900
- Edmond CATTIAUX
- Cesar CATTIAUX
- Ernest MUTTE
- François LENGLET
- Nicolas BROUTA
- Jules NOISETTE
- Jean Baptiste BRUYELLE
- Emile COLIN
- Jean Baptiste MAROUZE
- Jules CHEVALIER
- Eugène LAMOTTE
- François ALAOUCHERIE
- Victor DELHAYE
- Lucien MERIAUX
- Louis MERIAUX
- Camille CAUDRON
- Charles CAUDRON
- Cyrille MARCHANT
- Alphonse BOISSET
- Hugues TAISNE
- Henri TAISNE
- Henri DELMOTTE
A la veille de la grande guerre, les jeunes garçons sauront que mourir pour la mère patrie est un honneur et les filles sauront que soutenir l'effort de guerre à l'arrière est capital.
Une première formation est créée en 1874 par Monsieur LENGLET, clerc et organiste à l'église d'Haspres. Quelques années plus tard, le 15 novembre 1878, une autre société est fondée sous la présidence du maire Auguste Caullet. Après avoir été rivales, les deux sociétés fusionnent pour donner naissance à la fanfare d'Haspres.
La demande de création d'une société de chants / chorale est déposée à la prefecture le 4 septembre 1891. Les membres payent une cotisation de 25 centimes par mois et "s'engage" à faire partie de la société pendant trois ans sans interuption.
Les répétitions ont lieu deux fois par semaine, tout sociétaire qui manque la répétition payera une amende de 25 centimes, de même celui qui arriva 15 minutes en retard, payera une amende de 10 centimes.
Liste des membres actifs au 3 septembre 1891
- Charles Edouard PETITJEAN
- Charles JACQUEMART
- Ferdinand MORELLE
- Joseph CACHEUX
- Désiré MORELLE
- Jean Baptiste POTTIEZ
- Jean Baptiste GALOIS
- François BERA
- Charles DELMOTTE
- Désiré PRINCELLE
- Léon MORELLE
- Georges MORELLE
- Virgile BREUCQ
- Jean Baptiste MORELLE
- François BOUCLY
- Jean Baptiste MAROUZE
- Charles MERIAUX
- Joseph GRUET
- Charles RENAUT
- Désiré DABANCOURT
- Alfred DUPAS
En 1896 la société présidée par M.Caullet, compte 32 exécutants.
Ce jeu était autrefois pratiqué dans de nombreux cabarets de la région. Les jours de ducasse, mon père et moi allions chez Léon Taisne voir les concours de jet. On y jouait aussi au café de l'équelette et chez Cavreau.
A l'ducasse, y avot les jav'loteux qui v'notent tirer au cabaret pas lon dé l'plache". (J.DAUBY)
Le jeu consiste à lancer dans une cible de bois ou de paille, une pointe d'acier d'une vingtaine de centimètres. Le poids du javelot peut atteindre les 500 grammes. L'empennage est constitué de plumes de dinde ou dindon disposées de façon hélicoïdal, ceci afin d'obtenir un effet de rotation du javelot lors du lancé.
Les javeloteux lancent cette pointe d'acier sur une cible en bois située à une distance de 8 mètres. Sur la cible sont fixés deux cercles metalliques appelés bagues, d'un diamètre respectif de 6 et 21 centimètres. Chaque cercle valant 2 et 1 points. La partie se gagne sur 11, 21 ou 31 points.
Cette vielle coutume était autrefois très répandue dans la région. Il y avait dans chaque village un gallodrome et Haspres était réputé pour la ferveur de ses coqueleux.
Généralement installé dans une cour ou dans l'arrière salle d'un cabaret (café de la musique, chez Uranie, au Marais, dans la cour du Tiot Mutte), le gallodrome réunit les coqueleux, parieurs, propriétaires de coq et jury des combats autour d'un parc grillagé où se déroulent les affrontements entre coqs. La loi Gramont interdit en 1852 les jeux aboutissant à des morts d'animaux sans toutefois entraver cette tradition. La seconde guerre mondiale met un coup d'arrêt à cette coutume et lors de la loi d'interdiction de 1963, il n'y a pratiquement plus de coqueleux haspriens.
En 1968 Léon Taisne refonde une nouvelle société. Un gallodrome clandestin fut construit au café de la concorde.
En 1973, l'association Dagniaux Delfosse remporte le championnat du Valenciennois avec 15 victoires sur 15 combats. La mort de Léon Taisne en 1984 sonna le glas de cette coutume.
- Le jeu de balle (dérivé du jeu de paume) est un sport très prisé. Celui ci est pratiqué dans la rue qui en porte le même nom, aujourd'hui elle s'appelle la rue Waldeck Rousseau.
- L'estaminet (cabaret) est un lieu convivial ou l'on se rassemble le soir après la journée de travail pour boire un coup, prendre des nouvelles, jouer à l'astiquette, aux dominos, aux dés, aux fléchettes ou encore au javelot. Ce dernier se pratiquait en intérieur ou extérieur.
- Dans les années 1950 pendant les trois jours de ducasse des concours de manille et de javelot sont organisés chez Armand Mériaux (rue Faidherbe), chez Alphonse Tahon (rue de Fleury) on tire à la carabine et on joue aux boules, au café Marcel Lancelin (rue Lodieu) on joue à la manille, etc...
- Les "vieux" de la commune ne sont pas oubliés. Des réceptions sont organisées en leur honneur au salon du café de la musique.
- Dans les années 1960 de nombreux bals (soirée dansante) sont régulièrement organisés.
- Lors des fêtes du 14 juillet le mat de cocagne se dresse dans le parc Forget, des concours de tir aux pénalties et des courses de sac sont organisés. La fanfare, les canonniers et les sociétés locales défilent dans les rues.
Aujourd'hui la fête de l'ascension et les ducasses subsistent, malheureusement sans cet esprit de retrouvailles joyeuses des années d'antant.