Plusieurs cartes anciennes montrent l'existence d'un moulin à vent à Haspres. A ce jour, peu, voir aucun document n'ont été trouvé sur le sujet. Toutefois le cadastre de 1810 nous permet de le situer très exactement.
Au sommaire :
» Trois moulins à vent
» Un vol au moulin
Jusqu'à la révolution industrielle du XIX° siècle, l'eau et le vent sont les principales sources d'énergie. La région est particulièrement favorable à l'établissement de moulin, les vents sont constants et le réseau hydraulique est bien fourni.
Les moulins, seules machines de l'époque sont utilisés pour broyer la "wedde" (plante bleue utilisée dans la teinture au moyen âge), les oléagineux ou encore le blé.
L'étude du registre de capitation de 1788 permet d'affirmer qu'il y avait à Haspres plusieurs moulin à vent. Par ailleurs le plan cadastral de 1810 permet d'en situer un à l'Obette.
En 1772 les demandes d'érection de moulin à vent se multiplient dans toute la région. Sans doute la hausse et la taxation du prix du grain qui ne cesse de monter. A cette époque les crues de la Selle stoppant régulièrement l'activité du moulin des moines encouragent les sieurs Joseph Diselers (mayeur) et Georges Lagrue a demander le droit d'ériger à Haspres un moulin à vent.
Les demandes vont se succéder, comme en témoigne les interventions du subdélégué à l'intendance du Hainaut.
Monseigneur,
J'ay examiné avec beaucoup d'attention la requête qui a été présentée au conseil par les sieurs Diselers et Lagrue aux fins d'être autorisé d'ériger un moulin à vent à moudre bled au village d'hapres,et que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser le 6 de ce mois pour vérifier si rien ne s'oposait à ce nouvel etablissement. Vous marquez ce que j'en aprendrois, et ce que j'en pensois.
Il paroit Monseigneur par le jugement du bureau des finances de Lille joint à la dite requête, qui déclare que la permission d'ériger le moulin en question peut être accordée, que toutes les formalités présenttée par les réglements qui concernent les établissements de cette nature ont été bien et dument remplies, et qu'il n'y a aucune oposition quelleconque à l'erection de ce moulin, laquelle sera aventageuse non seulement au domaine de sa Majesté qui se trouvera augmenté d'une reconnaissance annuelle de six florins, mais encore à la communauté du dit Hapres qui est très nombreuse en habitant et ou il n'y a qu'un moulin à l'eau, lequel est souvent exposé a "chaumé" par les débordements et envasement fréquent de la rivière de Selle sur laquelle il est situé.
J'estime donc Monseigneur que l'autorisation requise par les dits Sieurs Diseler et Lagrue leur sera accordée.
Il est certain que depuis plusieurs années les erections de moulins se multiplient considérablement, je pense qu'on peut en attribuer la cause au renchérissement du prix des grains de toute espèce, attendu que la rétribution des mouture se prend en nature, je ne prevois pas au reste que la multitude de ces établissements soit aucunement nuisible, je le considère au contraire comme avantageux pour sa Majesté dont elle contribue a augmenter les revenues de ses domaines fixes, et comme utile pour le public auquel elle fournit plus d'aisance et de choix pour la mouture de ses grains
J'ay l'honneur de vous renvoyer la dite requête avec le jugement du bureau des finances cy joint.
Dehault Delassus, Bouchain le 11 septembre 1772.
Requête du Sieur Renaut du 22 janvier 1774.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous adresser une requête par laquelle le nommé Regnaux demande la permission d'ériger un moulin à moudre bled sur une pièce de terre à lui appartenant au terroir d'Haspres, aux offres de païer au domaine une reconnaissance annuelle de 6 florins.
Quoique le bureau des finances de Lille auquel ce particulier s'est dabord adréssé, n'a trouvé aucun inconvénient à permettre cet établissement, comme vous le verré par son jugement du 21 juin dernier, j'e n'ai cependant pas voulu mettre cette dernière sous les yeux de monsieur le contrôleur général sans vous l'avoir communiquée.
Requête transmise à Dehault de Lassus
En 1776, nous trouvons la requête d'un nommé Bailleul, qui propose d'établir un moulin à vent sur une pièce de terre de trois mencaudées et demie, offrant au bureau des domaines du Roi à Bouchain une redevance annuelle de six florins. Le Sieur Bailleul n'a pas l'intention de construire un moulin à moudre le blé comme l'expose sa demande initiale, mais bien d'un moulin à tordre huile (graines d'oeuillettes et de colzats, cultivées en grande quantité dans la région), comme l'indique le jugement du bureau des finances de Lille.
Monsieur,
Après avoir examiné avec attention la requête cy jointe que le Sieur Bailleul habitant d'Haspres a fait présenter au conseil de sa Majesté pour être autorisé d'ériger au dit lieu un moulin à moudre bled, j'en ai fait l'envoy au maÿeur et gens de loy dudit Haspres, afin de m'assurer que l'erection proposé de ce moulin ne sera susceptible d'aucun inconvénient. Mais vous verrez par la lettre jointe du Sieur Diselers maÿeur de cette paroisse que le dit Sieur Bailleul est fort surpris que son avocat demande l'autorisation pour un moulin à vent a moudre bled, tandis qu'il n'a intention que d'ériger un moulin à vent a tordre huile, et que ce n'est que sur cette dernière espèce de moulin que porte le jugement du bureau des finances de Lille du 14 mars 1776.
Sur l'avis du directeur des domaines du roy de la province et ensuite d'information prises sur les lieux, le tout relativement a un moulin à vent à tordre huile; il sera donc indispensable de faire rectifier la dite requête par Mr Petit de la Borge qui paroit être l'avocat qui l'a formé et auquel le dit Sieur Bailleul vient de faire ecrire en conséquence pour qu'il ait a réduire sa demande a un simple moulin à vent à tordre huilz, dont l'érection ne sera susceptible d'aucun inconvénient et sera au contraire a tous egards avantageux au Roy et au public, puisqu'en augmentant le revenu domanial de sa majesté, lle contribuera a multiplier les ressources et moyen de moudre les grains d'oeuillettes et de colzats que les habitants de ce canton y cultivent avec succès et en grande quantité, n'existant au surplus aucun droit de banalité au dit Haspres, je me persuade d'autant mieux qu'on ne formera point d'oposition a cet établissement qu'il n'en est aparue aucune lors des publications faites publiquement au dit lieu avant de porter le jugement du bureau des finances de Lille.
J'estime donc Monsieur que dès que cette requête sera rectifiée, il echet d'autoriser l'erection du moulin à vent à tordre huile dont il s'agit moyennant la reconnaissance annuelle de 5 florins payable au bureau des domaines du Roy de Bouchain et aux autres charges clauses et conditions insérées dans le dit jugement joint du bureau des finances de Lille du 14 mars dernier.
Dehault Delassus, Bouchain le 3 mai 1776.
On ignore leurs formes originales, nous pouvons toutefois penser qu'ils ressemblaient à celui d'Avesnes le Sec.
Jusqu'a quand furent ils exploités et quel fut le motif de leur démolition ? Ces questions restent malheureusement sans réponse à ce jour.
Les faits qui sont racontés ci après sont issus des pièces du dossier jugé au tribunal criminel du département du Nord.
Le prévenu :
Le nommé Charles Gille, âgé de trente trois ans, mulquinier de profession, demeurant à Haspres, prévenu d'un vol de ferraille au moulin Lagrue dans la nuit du quinze au seize Ventôse (5 mars 1795) entre minuit et une heure.
Ses complices :
Jean Baptiste Gilleron son beau frère et Jean Baptiste Joly l'instigateur des faits, celui-ci rétribue dix sols la livre de ferraille en vue de construire un chariot.
Les faits :
Dans la nuit du 15 au 16 ventôse, nos trois complices se rendent au vieux moulin à vent appartenant à Lagrue, situé le long du chemin qui conduit à Saulzoir. Munis d'un gros marteau de maréchal, ils commencent à extraire la ferraille du vieil édifice.
Nos trois acolytes n'en sont pas à leur premier coup, quelques heures plus tôt ils étaient à la ferme de Bouveneuil à Verchain. Aidé par l'obscurité et l'heure avancée de la nuit, ils travaillent méthodiquement. Surpris par une patrouille (*) de la garde communal Gilleron et Joly ont le temps de prendre la fuite. Gille n'a pas la même veine, il est arrêté sur le champ !
(*) Suite à un vol de riz en grande quantité, des patrouilles sont organisées. Celle-ci emmenée par Nicolas Bailleul sillonne les rues du village, lorsqu'elle entends des bruits en provenance du moulin Lagrue. Cette patrouille est composée de Nicolas Bailleul, Jean Baptiste Gaisse, Auguste Gaisse, Constant Bricout, François Deliège, Hubert Galois, Jean Baptiste Colin, Joseph Laumonier, Joseph Caudemont, Armand Dhainaut, Pierre Georges Boucly, André Delmotte et Noël Deudon.
Il est conduit à la maison d'arrêt du district de Valenciennes.
L'interrogatoire de Charles Gilles:
Interrogé s'il était seul et avec qui il était au moulin du dit Lagrue
A répondu que non, qu'il y avait avec lui Jean Gilleron et Jean Baptiste Joly qui leur commanda d'arracher les ferrailles dudit moulin et qui leur en donna 10 sous de la livre.
Interrogé si c'étoit la première fois qui leur commanda pareille delit :
A répondu que non, qu'il l'étoit pour la seconde fois qui lui en vendoit, puisque son chariot presque toute arrengé.
Interrogé d'ou venoit le fer qui lui a vendu la première fois :
A répondu qu'il venoit de la ferme de Bouvenoeuil à Verchain et qu'il l'avoit arraché de la veille roue de chariot, conjointement avec Jean Baptiste Joly et Jean Gilleron.
Interrogé s'il connessoit le gros marteau et a qui il l'avoit eu :
A répondu qu'il le reconnessoit trés bien, mais que l'étoit le dit Jean Baptiste Joly qui leur avoit procuré et qu'il ignore d'ou il provient.
Interogé s'il ne l'étoit point introduit la nuit du 14 au 15 de ce mois en la maison commune d'Haspres et au moulin à huile de bailleul fils :
A répondu que non et qu'il ignoroit si quelqu'un si introduit ou point.
Interrogé s'il n'avoit pas d'autre fait à nous déclarer :
A répondu qu'un jour il étoit présent lorsque le dit Jean Baptiste Joly a pesé du fer chez lui dans une chambre haute, en présence du nommé Pio (Aimable Vérin), maréchal au dit Haspres, que le deuxième mettoit en usage pour le chariot du duit Joly.
Interrogé d'ou provenoit les ferrailles a lui représentées et par lui reconnues :
A répondu qu'il provenoit du moulin du dit Lagrue ou il fut arrêté.
Lecture à lui faite de son intérrogation a dit qu'elle contenoit vérité, observant cependant qu'à l'interpellation à lui faite d'ou provenoit le fusil que l'on a trouvé chez lui et a qu'elle dessein il l'avoit chargé, a dit qu'il l'avoit trouvé dans les champs après la retraite des impériaux et que s'il étoit chargé, c'étoit pour tirer des corbeaux pour lui aider à sa subsistance.
Le jugement :
Vu la déclaration des jurés dudit district : "Oui il y a lieu" à accusation. "Nous ordonnons que le nommé Charles Gilles agé de trente trois ans, natif d'Haussy, taille de cincq pieds, un pouce, cheveux et sourcils chatains clair, le visage long, couleur pâle, les yeux gris,
le nez aquilain, la bouche petite, le menton petit et rond, habillé d'un habit fort court d'une étoffe grise, d'une veste et culotte grise toute déchirée, d'une paire de bas de laine grise et d'une mauvaise paire de sabots aux pieds, prévenu d'avoir à dessein de nuire volé nuitamment du fer à la ferme
de Bouveneuil et au moulin du nommé Lagrue, sera pris et appréhendé au corps et conduit directement en la maison de jusitce du tribunal criminel du présent département du Nord, sise en la commune de Douai, et que toutes les pièces du procès seront envoyés et déposées au greffe du tribunal crimine.
Mandons et ordonnons à tout exécuteur des mandemons de justice sur ce requi de mettre la présente ordonnance à exécution, et sera par nous donné avis de la présente ordonnance à la municipalité de Valenciennes où étoit détenu le dit Charles Gille, et à la municipalité d'Haspres où il étoit domicilié.
Mandons et ordonnons au gardien de la dite maison de justice de recevoir en la dite maison le dit Charles Gille, le tout en se conformant à la loi requerons tous dépositaires de la force publique auxquels la présente ordonnance sera notifiée de préter main forte pour son éxécution."
Fait à Valenciennes le 6 germinal an III de la République, signé Le frère, directeur du juré et Nicodème Commissaire National.